© Terres de Nataé

L’ancien Zoo de Pont-Scorff change de nom et devient les Terres de Nataé

Au cœur de l’actualité durant ces deux dernières années, le Zoo de Pont-Scorff franchit une nouvelle étape dans son histoire et signe le début d’une nouvelle ère.

Une histoire à rebondissements

Pour bien comprendre ce qu’il s’est passé au Zoo de Pont-Scorff, il faut remonter en décembre 2019. À cette époque, le zoo est à vendre. Une coalition d’associations et d’ONG saisit l’occasion en lançant un appel aux dons pour racheter le parc. L’objectif principal était d’en faire un centre de réhabilitation et de soins de la faune sauvage. Le parc devait accueillir les animaux saisis par la justice ou victimes de trafic pour les soigner et les réintroduire, dans la mesure du possible, dans leur milieu naturel. Le projet portait alors le nom de « Rewild » qui signifie « réensauvagement ». Dans cette coalition de plusieurs ONG se trouvait notamment Sea Shepherd, l’association le Biôme ou encore One Voice. Rapidement, les fonds nécessaires au rachat du parc ont été réunis. Grâce à des milliers de dons, la coalition Rewild parvient à obtenir près de 700 000 € en seulement quelques jours. Mais c’est ensuite que les choses se compliquent car le projet a du mal à se mettre en place. La préfecture du Morbihan va aller jusqu’à reprocher des manquements sur place en terme d’encadrement des animaux mais aussi de sécurité. Rewild va alors éclater perdant la plupart de ses membres et le zoo sera finalement placé en redressement judiciaire en début d’année 2021 puis en liquidation judiciaire à la fin du mois de mars.

S’en est suivi un appel à repreneurs où quatre candidats se sont manifestés : un dossier déposé par l’organisation Sea Shepherd qui faisait partie de Rewild, un dossier déposé par des investisseurs hollandais qui possèdent déjà plusieurs zoos dans le monde, un dossier d’une grande partie des salariés du parc sous forme de SCOP (Société Coopérative de Production), et enfin un dossier déposé par un entrepreneur breton accompagné d’un groupe d’investisseurs. C’est ce dernier, Sébastien Musset qui a obtenu les faveurs du tribunal de commerce de Lorient et qui est arrivé à la tête du parc en mai dernier.

Un nouveau nom pour une nouvelle dynamique

Sébastien Musset est un entrepreneur costarmoricain, dirigeant d’un restaurant à Perros-Guirec et ancien directeur général adjoint du Crédit Mutuel Arkéa. Malgré un parcours loin des parcs zoologiques, Sébastien Musset est passionné par les animaux et a su s’entourer pour mener à bien le nouveau projet. « Aujourd’hui, nous avons la chance d’avoir recruté une docteur vétérinaire assez rapidement, il y a un directeur opérationnel qui est également responsable animalier, indique Sébastien Musset. On travaille aussi avec un vétérinaire senior qui nous supervise qui est le docteur Florence Ollivet-Courtois. C’est un travail d’équipe et chacun apporte dans son domaine de compétence ».

Les maîtres-mots du nouveau projet sont conservation et protection des animaux. L’objectif principal du parc sera d’accueillir uniquement des espèces menacées et dont il y a des besoins d’accueil dans les parcs zoologiques européens. « Nous avons vraiment construit toute la logique du parc sur la protection des espèces en prenant comme référence les besoins de conservation ex-situ, sans vraiment choisir les espèces. Nous avons plutôt laissé le choix dans les échanges avec les différentes institutions pour se dire, en fonction des besoins, nous allons nous adapter et ce sont ces espèces là que nous allons accueillir ».

Dans l’approche pour les visiteurs, le parcours sera thématisé sur les aventures des grands navigateurs et corsaires bretons. « Nous ne voulions pas une approche classique de visite enclos par enclos mais plutôt emmener les visiteurs dans un voyage. On a découvert que de grands navigateurs, qui partaient de Brest, de Quimper ou de Lorient, sont allés à la découverte d’autres continents et ont ramené pas mal de choses de leurs voyages notamment des animaux. Nous, nous sommes dans la logique inverse c’est-à-dire que nous emmènerons les visiteurs à travers cette référence historique mais en précisant que de notre côté, nous réintroduisons dans le milieu naturel ces animaux, sous-réserve bien sûr que ce soit des espèces menacées et avec une capacité d’accueil dans leur milieu naturel ».

Sans pour autant vouloir faire table rase du passé du site, le nouveau directeur dévoile également un nouveau nom associé au projet de l’ancien Zoo de Pont-Scorff : les Terres de Nataé. Un nom qui s’éloigne du terme « zoo » et qui fait référence à une déesse celte. « Quand nous avons travaillé avec l’un des associés sur le nom du parc, je lui ai indiqué vouloir vraiment un nom qui dépasse le mot zoo, qui dépasse le mot parc, qui soit quelque chose qui ancre le projet dans ses différentes dimensions, explique le nouveau directeur du parc. Je rejoint complètement Pierre et François Gay qui répondaient à une interview récemment à ce sujet. Le mot zoo est un mot magnifique, c’est une référence à des sciences, à la zoologie, mais malheureusement, comme bien souvent dans notre société actuelle, dans la perception du collectif, la signification du mot est biaisée. Un zoo comme celui de Pont-Scorff n’a pas aidé à ce que le mot ne soit pas biaisé, compte tenu du manque d’investissements, du manque d’améliorations des équipements autour du bien-être animal, cela donne une connotation très négative du mot zoo. Je trouve cela dommage et j’espère que dans les années ou les décennies qui viennent, on arrivera à réhabiliter ce mot là. Donc j’ai trouvé que « Terres » c’était très bien, il y avait également ce petit clin d’œil au monde des navigateurs qui, dans l’esprit collectif, s’écrient « Terre en vue ! » lorsqu’ils découvrent un nouveau continent ». Pour compléter le nom, la direction s’est penchée sur la mythologie celte et le choix s’est porté sur Nataé, déesse de la protection et de la préservation de la nature. « Terres de Nataé nous est apparu cocher toutes les cases, je suis très content de ce nom là et très fier », ajoute Sébastien Musset.

Une grosse phase de travaux pour débuter

L’ouverture des Terres de Nataé est pour l’instant fixée à juin 2022. Mais pour y parvenir, le parc doit subir de très nombreuses améliorations, des travaux considérables sont prévus et ont même déjà débuté dès le 20 septembre dernier. Ces travaux devraient s’organiser autour de trois axes dont le premier d’entre eux concerne bien évidemment la partie animalière. « La logique c’est d’agrandir les enclos. Par exemple l’espace des loups sera presque multiplié par trois. Pour d’autres espèces nous allons regrouper les enclos, plutôt que d’en avoir trois petits nous en ferons un grand ». Sur les réseaux sociaux, le parc a déjà publié des images de la destruction des gradins de spectacle autrefois dédiés aux représentations des oiseaux et des otaries. « Je ne souhaite pas de spectacle sur les Terres de Nataé, signale Sébastien Musset. Quand je parle de spectacle c’est au sens de contrainte de l’animal, de dressage, je ne veux pas ce type de choses là. Par contre, l’observation des comportements animaliers, ça c’est déjà un spectacle et je veux que l’on réussisse à construire une relation entre les visiteurs et les Terres de Nataé autour de ce sujet ».

Le second axe d’amélioration concernera les visiteurs. « Il y avait pas mal de bâtiment dans un mauvais état. Dès l’accueil, les bâtiments de restauration, tout cela était vraiment dans un état extrêmement compliqué ». À ce sujet, la direction prévoit un tout nouveau bâtiment d’accueil mais également un nouveau bâtiment de restauration qui devrait donner une ouverture sur la plaine des éléphants.

Enfin, le dernier axe portera sur la réglementation notamment autour de la sécurité et de l’assainissement de l’eau. C’est d’ailleurs ce qui avait été reproché il y a quelques mois à la coalition Rewild par la préfecture du Morbihan mais qui mettait en lumière des problèmes de longues dates. « Ce sont les trois grands axes des travaux que nous menons pour un montant total qui va dépasser les 4 millions d’euros, ajoute le président des Terres de Nataé. Nous allons croiser les doigts pour qu’il n’y ai pas de nouvel arrêt du pays lié à la pandémie et qu’il n’y ai pas de ruptures de stock sur les matériaux qui nous sont indispensables. C’est une course contre la montre qui est engagée avec les entreprises locales avec qui nous travaillons ».

Des mouvements chez les animaux

Afin de parvenir à réaliser des travaux d’amélioration pour les structures dédiés aux animaux, il faut parfois se séparer de certains d’entre eux. Et pour cela, toujours en cohérence avec le projet, la direction du parc a énormément travaillé avec d’autres parcs zoologiques, avec des sanctuaires mais aussi les institutions zoologiques présentes en Europe. « On a décidé qu’il y avait un certain nombre d’espèces qui ne faisaient pas partie de notre projet ». Au total, ce sont plus d’une cinquantaine d’animaux qui ont déjà quitté le parc, des mammifères mais aussi des oiseaux qui sont notamment partis aux Aigles du Léman et au Marais Poitevin. « Les tortues des Seychelles sont également retournées dans le zoo italien qui avait demandé leur retour », fait savoir Sébastien Musset. Pour d’autres espèces comme les jaguarondis, le nombre d’individus était devenu trop important pour l’espace qui leur était dédié et le parc a déjà choisi d’en faire partir. « Nous avons beaucoup d’animaux vieillissants ou isolés, qui ne sont plus en âge de se reproduire, mais d’autres espèces comme les jaguarondis se reproduisent encore. Quand nous avons discuté avec le TAG (Taxon Advisory Groups) en charge des félins, ils nous ont dit que les jaguarondis avaient déjà pas mal de conservation ex-situ, qu’il commençait à y avoir de beaux travaux de conservation in-situ et que dans ce contexte, si nous pouvions les aider sur d’autres espèces de félins, cela les intéresserait davantage ».

Conformément à la raison d’être du projet, la direction a par exemple décidé de s’investir dans l’EEP (Programme d’Élevage Européen) des panthères nébuleuses. « C’est un exemple parmi d’autres et on est déjà en contact avec l’EEP pour regarder quels animaux on pourrait accueillir dans le nouvel enclos des panthères nébuleuses ». Mais pour les accueillir, l’enclos doit être fait et Sébastien Musset mise sur une réalisation entre décembre et février prochains. « L’arrivée de nouveaux animaux ne sera validée qu’à partir du mois de mars ou avril, pas avant ». Dans l’optique de n’accueillir que des espèces menacées dans leur milieu naturel et pour lesquelles il y a des besoins en conservation ex-situ, le parc travaille notamment avec l’EAZA (Association Européenne des Zoos et Aquariums) mais aussi les différents EEP.

Des projets au delà du parc animalier

Pour aller plus loin dans la protection des animaux, les Terres de Nataé devraient être bien plus qu’un parc animalier. Un projet de fondation est à l’étude et permettra à l’avenir, de créer un refuge pour la faune sauvage exotique mais également un centre de soins pour la faune sauvage locale. « Pour la partie centre de soins, nous voulons travailler en collaboration avec les nombreux centres de soins qu’il y a en Bretagne, qui sont tous autant submergés les uns que les autres, pour offrir une capacité d’accueil supplémentaire ». Du côté du refuge, même si pour l’heure il n’y a pas encore de priorité sur les espèces à accueillir, Sébastien Musset évoque une piste. « Pour faire référence à Pierre Thomas, qui a fondé le parc en 1973, et à son amour des félins, le refuge de Nataé sera très probablement placé sous l’égide des félins. Il y a énormément de félins qui sont à accueillir en refuge ».

Nataé sera donc un projet global complètement dédié aux animaux de tous horizons avec d’un côté, les Terres de Nataé pour la conservation des espèces et ouvert au public, et puis de l’autre, un volet sur la protection des animaux grâce à un refuge et un centre de soins, qui seront placés sous l’égide de la Fondation Nataé, et qui ne seront pas ouverts aux visiteurs. En attendant l’ouverture au public du site prévue pour l’instant en juin 2022, le parc propose de suivre ses aventures et l’avancée des travaux directement sur ses réseaux sociaux mais aussi via son site internet, tout neuf et créé pour l’occasion.

Articles similaires