Entre 2023 et 2024, la collection animalière du Zoo des Sables s’est enrichie de nouvelles espèces, pour la plupart originaires de Madagascar, mais qui ont toutes un point commun : elles sont menacées de disparition dans leur milieu naturel.
Un nouveau gros rongeur accompagné de l’un des plus petits primates du monde
Depuis juillet 2023, une espèce de rongeur peu commune a fait son apparition au sein du vivarium du Zoo des Sables. « Ce sont des vositses (Hypogeomys antimena), des rongeurs aussi appelés rats sauteurs géants de Madagascar, indique Floriane Guibert, Assistante scientifique au Zoo des Sables. C’est un gros rongeur endémique de Madagascar dont il ne reste que très peu d’individus in-situ. » Cette espèce est en effet considérée comme « En danger critique d’extinction » (CR) sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Elle subit de nombreuses menaces liées aux activités humaines. « À Madagascar, c’est principalement la déforestation qui pose problème : l’exploitation du bois, la conversion des terres pour l’agriculture, le pâturage. Il y a aussi les effets du réchauffement climatique, comme l’assèchement des milieux naturels. » Les vositses sont inscrits dans un ISB (International Studbook), un registre qui recense tous les individus de l’espèce dans les parcs zoologiques européens, soit aujourd’hui 52 individus répartis dans une vingtaine d’établissements. « Nous avons accueilli deux mâles, un père et son fils, arrivés d’un zoo de République Tchèque. À terme, une femelle remplacera le vieux mâle. »
Les deux rongeurs occupent désormais un espace réaménagé du vivarium, en nocturama, qui accueillait auparavant un crocodile nain parti vers un autre parc zoologique. « Ils partagent leur enclos avec des microcèbes de Goodman (Microcebus lehilahytsara), une des nouvelles espèces accueillies cette année. Les vositses grimpent bien et sautent, d’où leur surnom de rat sauteur. Ils peuvent se retrouver en hauteur sur des branches avec les microcèbes, mais vivent principalement au sol. » Le microcèbe, le plus petit primate au monde, appartient à la famille des lémuriens. Originaire de Madagascar, cette espèce est classée « Quasi menacée » (NT) par l’UICN et seule une dizaine de zoos dans le monde l’héberge actuellement. « Nos collègues tchèques nous ont suggéré une cohabitation avec les microcèbes. Nous avons donc accueilli un groupe de 5 mâles provenant du Zoo de Zurich en Suisse. Ils se connaissent bien, ce qui facilite leur adaptation. » Cette cohabitation est unique en France : le Zoo des Sables est le seul parc zoologique du pays à présenter ces deux espèces au public. Le vivarium a également accueilli une nouvelle pensionnaire, une femelle galago du Sénégal, pour former un couple reproducteur. « Jusqu’à présent, nous n’avions que des mâles. La femelle est arrivée de Touroparc en juillet dernier. »
Plusieurs espèces originaires de Madagascar
Depuis quelque temps, les équipes du Zoo des Sables ont choisi de faire évoluer la collection animalière vers des espèces considérées comme menacées dans leur milieu naturel. « Depuis deux ans, nous ciblons des espèces classées au moins “Quasi menacées” (NT) sur la liste rouge de l’UICN jusqu’à “En danger critique d’extinction” (CR), portant à 63% notre taux d’espèces sensibles, explique Floriane Guibert. Certaines espèces moins menacées partiront pour laisser place à d’autres. La conservation est aujourd’hui notre moteur. » Parmi les nouvelles espèces, la majorité est originaire de Madagascar, une région du monde particulièrement touchée par les activités humaines qui menacent de nombreuses espèces. « Ce n’est pas totalement un hasard, Madagascar possède une biodiversité incroyable mais extrêmement menacée. Quand on s’oriente vers la conservation d’espèces menacées, on tombe forcément sur des espèces malgaches. » En 2023, le parc a accueilli un couple de sarcelles de Bernier, des canards endémiques de Madagascar classés « En danger d’extinction » (EN) par l’UICN. « Nous les avons installées dans la volière à l’entrée du parc, avec les ibis rouges et les ibis blancs. Dans cette volière, nous sommes sur un biotope forêt tropicale, donc nous avons des espèces originaires de ce biotope et pas d’une même région. Le mâle vient du Safari Park Dvůr Králové en République Tchèque, et la femelle d’un élevage privé aux Pays-Bas. »
Le Zoo espère obtenir de la reproduction avec les sarcelles de Bernier, même si les premières pontes constatées au cours de l’année n’ont pas été fructueuses. Volonté partagée également pour une autre nouvelle espèce malgache accueillie au printemps 2024 : le lémur couronné (Eulemur coronatus). « Au début, nous avons accueilli deux femelles puis l’une d’elle a été remplacée par un mâle venant d’Angleterre. » À l’image de la plupart des lémuriens, le lémur couronné est menacé, se trouvant « En danger d’extinction » (EN) selon l’UICN. Le couple récemment installé au Zoo des Sables partage son île avec un groupe de 5 mâles makis catta, eux aussi fraichement arrivés, avec qui les mises en contact se font progressivement.
Plusieurs autres espèces d’oiseaux
Au total, huit nouvelles espèces ont rejoint le Zoo des Sables ces deux dernières années. Des pigeons de Nicobar (Caloenas nicobarica), hébergés dans la volière des ibis et des sarcelles de Bernier, ainsi que des roulrouls couronnés (Rollulus rouloul), hébergés dans le vivarium, deux espèces originaires d’Asie du Sud-Est, font ainsi partie des nouveaux arrivants. « Le rouloul couronné est une espèce très sympa et en plus nous avons eu de la reproduction, se réjouit Floriane Guibert. C’est une espèce considérée comme « Vulnérable » (VU), nous avons accueilli un couple en mars 2023 et il y a eu deux couvées successives qui ont fonctionné avec un petit à chaque fois. Le premier est un mâle et le second une femelle. Il faut juste être un peu patient le temps que le plumage soit définitif, le mâle arbore une belle crête rouge donc on ne peut pas se tromper. Le premier petit est né en juin et nous avons pu le sexer fin août. » Deux espèces de psittacidés ont aussi élu domicile au parc, comme le couple d’amazones lilacines (Amazona lilacina), cohabitant désormais avec les aras de Buffon (Ara ambiguus). Ces deux espèces sud-américaines sont en plus classées « En danger critique d’extinction » (CR). « Nous sommes contents car les aras de Buffon ont un caractère un peu particulier, ils sont aussi plus gros que les amazones, mais au final, ça se passe bien. La femelle amazone lilacine vient du Zoo de Lyon et le mâle du Zoo Landau en Allemagne, et nous attendons également de la reproduction avec ce couple. »
Depuis un an, le Zoo des Sables héberge également un groupe de cinq perruches cornues, un autre psittacidé originaire de Nouvelle-Calédonie. Cette espèce est classée « Vulnérable » (VU) selon l’UICN, elle n’est visible que dans deux parcs zoologiques français et seulement 9 au total à travers l’Europe pour une trentaine d’individus. Arrivées en décembre 2023, les perruches cornues ont été installées dans la grande volière océanienne d’immersion du parc, aux côtés notamment des loriquets arc-en-ciel. « C’est une espèce qui est très intéressante en termes de conservation, détaille Floriane Guibert. Avec EcoZoo Conservation, l’association du Zoo des Sables, nous soutenons un projet de conservation avec une association de Nouvelle-Calédonie, qui vise à faire un état des lieux de la répartition des perruches cornues dans cette île pour ensuite comprendre les paramètres qui pourraient faciliter le maintien et l’implantation de l’espèce. » Le groupe est actuellement composé de 3 mâles et de 2 femelles qui ont rejoint le parc depuis un élevage privé en Suisse. « Le CDE (Conservatoire d’Oiseaux Exotiques) participe au programme que nous soutenons, c’est une vraie collaboration. Il y a de plus en plus d’investissement chez les éleveurs privés dans la conservation, il y a un vivier chez eux qui peut être très intéressant, ils sont parfois très pointus sur des espèces en particulier et de pouvoir associer tout le monde c’est vraiment quelque chose de bien. » Les perruches cornues sont encore jeunes mais l’équipe animalière du Zoo des Sables espère bien évidemment voir se former des couples à l’avenir pour lancer la reproduction de cette espèce. Mais il faudra être patient car il peut se passer encore plusieurs années avant d’observer les premières pontes.