Une nouvelle naissance exceptionnelle d’une espèce menacée d’extinction a eu lieu au Parc de Branféré il y a quelques mois : la venue au monde d’un bébé hippopotame pygmée !
Toute cette semaine, Nature et Zoo vous propose une série d’articles consacrés aux actualités du Parc de Branféré. La naissance d’un petit hippopotame pygmée, l’arrivée de nouveaux pensionnaires et de nouvelles espèces, la construction d’une nouvelle volière scientifique… Retrouvez un article par jour du 8 au 11 octobre 2024 et découvrez les actualités du Parc de Branféré en 2024 !
Une naissance rare et attendue
Le 21 mai 2024 à 2h20 du matin, sous l’œil attentif des caméras de vidéosurveillance, un bébé hippopotame pygmée est né au Parc de Branféré. « C’est un petit mâle, se réjouit Alexandre Petry, Directeur Zoologique et Scientifique au Parc de Branféré. C’est plutôt une bonne nouvelle pour les hippopotames pygmées car habituellement, il y a plus de femelles qui naissent mais sur les dernières naissances, il y a eu un peu plus de mâles, ce qui rééquilibre le ratio mâles/femelles. » La femelle, Ola, a mis au monde son deuxième petit après une gestation de plus de 7 mois. « Nous attendions la naissance, nous l’avons même attendu longtemps car le petit est né à 214 jours et demi et c’est vraiment la gestation la plus longue. » Il s’agit du deuxième petit du couple Ola et Sakassou après la naissance de Moyamba en 2018, aujourd’hui dans un autre parc zoologique en Espagne. La mise en contact des deux hippopotames a eu lieu en octobre 2023, un processus méticuleux orchestré par l’équipe zoologique et sur les recommandations du coordinateur européen de l’espèce. « Après la naissance de 2018, nous n’avions pas les recommandations pour les reproduire, donc ils sont restés chacun de leur côté pendant un bon moment. Nous étions même en train de reprendre la périodicité des cycles de la femelle mais plutôt dans un but de les mettre ensemble en dehors de la période de reproduction, pour leur bien-être et pour qu’ils continuent à avoir des interactions. Et puis finalement, nous avons eu l’accord pour les reproduire à nouveau l’été dernier, nous ne les avons mis ensemble que deux fois et nous avons constaté la gestation en début d’année. Nous savions ensuite approximativement quand le petit allait arriver. »
Des premiers pas suivis attentivement
Chaque étape de la gestation a été minutieusement suivie, de l’observation du cycle des chaleurs chez la femelle, des signes d’intérêt entre elle et le mâle, jusqu’au suivi de la gestation avec une pesée mensuelle, des échographies deux fois par mois et des prises de température quotidiennes durant le dernier mois. Un espace de naissance a été aménagé par l’équipe technique du Parc de Branféré avec l’ajout d’un toit et de parois pour offrir de l’intimité à la femelle. Les premiers jours du nouveau-né sont décisifs et il reste sous la surveillance attentive des soigneurs mais surtout de sa mère. « Ola est une très bonne maman avec lui, poursuit Alexandre Petry. Son papa n’aura aucune interaction avec lui, ce sera ensuite au coordinateur de nous dire dès qu’il sera nécessaire d’envoyer le petit ailleurs. Sa grande sœur est restée jusqu’en 2021, jusqu’à ses 3 ans. Elle était déjà mature, c’est la limite et on commençait à voir apparaître quelques tensions. » À la suite de quelques propositions des soigneurs du parc, le nouveau-né a été nommé Dabou par les visiteurs abonnés aux réseaux sociaux de Branféré. « Aujourd’hui il va très bien, il commence de plus en plus à explorer son environnement et il est visible soit à l’intérieur soit à l’extérieur. Nous devions faire des petits ajustements sur l’enclos extérieur pour être sûrs qu’il ne puisse pas se faufiler quelque part. Maintenant il sait nager, au début nous faisions des séances plutôt surveillées notamment pour l’apnée. Normalement ils ne vont pas trop dans l’eau quand ils sont petits et chez nous le bassin est assez profond donc nous avons fait progressivement ce que nous appelons des « cours de natation » pour s’assurer qu’il soit bien capable de faire de l’apnée pour ensuite lui donner accès au grand bassin. » Le Parc de Branféré abrite des hippopotames pygmées depuis déjà de nombreuses années. « Ola est arrivée en 2008, elle est présente depuis qu’il y a des hippopotames pygmées à Branféré. Sakassou lui est arrivé en 2014, il y avait déjà eu un autre mâle avant lui. »
Une espèce en danger à protéger
La naissance de ce bébé hippopotame pygmée est une excellente nouvelle pour la préservation de cette espèce classée « En danger d’extinction » (EN) sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). « L’hippopotame pygmée est originaire d’Afrique de l’Ouest, il vit en Côte d’Ivoire, au Sierra Leone, en Guinée ou au Libéria, explique Alexandre Petry. Ils sont très difficiles à observer dans le milieu naturel, on ne les voit quasiment jamais et tout ce que l’on connaît d’eux vient des parcs zoologiques. » La population sauvage de l’espèce est estimée entre 2000 et 5000 individus mais de façon très incertaine. « S’il y en a 5000 c’est bien, s’il y en a 2000 c’est critique. Donc par principe de précaution, ils ont le statut de « En danger » dans la nature. » L’hippopotame pygmée fait notamment face à de nombreuses menaces telles que la déforestation et la perte de son habitat naturel. « La déforestation pour le bois précieux mais aussi pour les mines, afin de récupérer des diamants, de l’or et des métaux précieux. Il vit aussi dans des pays où la situation géopolitique est relativement instable. » Le petit Dabou est né dans le cadre du Programme Européen pour les Espèces menacées (EEP) dédié aux hippopotames pygmées et qui regroupe environ 120 hippopotames pygmées dans les parcs zoologiques européens. « C’est le Zoo de Bâle en Suisse qui en est le coordinateur pour environ 50 institutions zoologiques. »
Dans le but de mieux connaitre cette espèce, le Parc de Branféré a notamment participé à deux études au sein du parc pour une utilisation future dans le milieu naturel. « Le premier est un projet de recherche assez novateur qui porte sur la détection et la différenciation d’individus par des chiens qui reniflent les selles des hippopotames pour les différencier individuellement et permettre de mieux inventorier les individus dans la nature. Nous avons aussi participé à des projets d’études sur les vocalisations entre les hippopotames, entre la mère et son petit notamment mais nous allons également travailler sur un nouveau projet sur les vocalisations au moment de la reproduction, notamment pour favoriser la détection des chaleurs et le rut du mâle. Il y a encore beaucoup de parcs qui ont du mal à savoir à quel moment la femelle est en chaleur pour la mettre avec le mâle. Chez nous, les comportements de Sakassou et Ola sont assez marqués et cette étude pourrait permettre de créer un guide de reproduction pour les autres structures. »