Quatre ans seulement après leur arrivée, les babiroussas semblent se plaire au CERZA. Le groupe s’est encore agrandi cette année avec les naissances de deux nouveaux petits.
L’année 2023 du CERZA a été marquée par de nombreuses naissances chez des espèces menacées et sur lesquelles il y a de forts enjeux de conservation. Les ours à lunettes, les ours bruns ainsi que les géladas ont déménagé dans de nouveaux espaces au cours des derniers mois dans l’optique générale d’améliorer leurs conditions de vie et de leur proposer toujours plus d’enrichissements. Des nouveaux enclos, une nouvelle espèce, une nouvelle passerelle et des naissances marquantes : retour sur l’année 2023 du CERZA.
Deux nouveaux petits dans le groupe de babiroussas
Sula, l’une des femelles babiroussas du CERZA, a donné naissance à un nouveau jeune au printemps dernier. Après une gestation d’un peu plus de 5 mois, suivie de près par l’équipe vétérinaire du CERZA, la femelle a donné naissance à un petit mâle le 13 mai 2023. « Nous avons une maison chauffée, explique Frédéric Houssaye, responsable de la conservation au CERZA. Nous avons placé des caméras à l’intérieur et aussi une petite niche dans laquelle la femelle vient mettre bas. » Ce système de vidéosurveillance, combiné à des pesées et des échographies régulières, ont permis à l’équipe d’observer la mère et son bébé jusqu’à sa naissance et durant les jours qui ont suivi, sans les déranger. « Nous surveillons également très régulièrement les mamelles de la femelle et comme les soigneurs peuvent entrer dans l’enclos et dans la maison avec eux, ils font venir Sula de près et ils peuvent regarder comment les mamelles grossissent. Quand elles sont bien développées et que la vulve gonfle, nous savons que la mise-bas est imminente. » À la naissance, les jeunes babiroussas sont très petits mais surtout très fragiles, ils ne pèsent que 800 grammes et requièrent l’attention entière de leur mère. Pour Sula, il ne s’agit pas de sa première portée puisque la femelle a déjà donné naissance à trois autres bébés depuis son arrivée au CERZA parmi lesquels il y a Salamy, la première femelle à avoir vu le jour au parc. Sa venue au monde en 2020 fut un événement pour le CERZA mais aussi pour les parcs zoologiques français puisqu’il n’y avait pas eu de naissance chez cette espèce depuis plus de 25 ans à travers le pays. Aujourd’hui, Salamy est adulte et il se trouve qu’elle a elle aussi eu un petit cette année. Il est né le 3 août dernier et il s’agit du second petit pour cette jeune femelle. Les deux nouveau-nés de cette année portent à 6 le nombre de babiroussas présents au CERZA actuellement. Un temps séparés, ils sont désormais visibles aux côtés de leurs mères respectives et du reste de la famille dans leur environnement extérieur.
L’unique famille de babiroussas en France
À travers cette belle réussite, le CERZA contribue activement à la conservation de cette espèce singulière et présente désormais un beau petit groupe. « Nous avons Tomini, le mâle, et Sula, la première femelle, énonce Frédéric Houssaye. C’est notre couple d’origine. Et il y a donc Salamy et Coppa, son petit qui lui partira dans un autre parc zoologique. » Arrivés en octobre 2019, Tomini et Sula, les parents, ont donné naissance à plusieurs petits depuis leur installation au CERZA. Le parc est d’ailleurs le seul et unique établissement à présenter des babiroussas à travers l’hexagone. « C’est une espèce que l’on voit très peu en parc zoologique. En France, autrefois, je me souviens en avoir vu au Zoo de Champrépus. En Europe, on a pu assez bien reproduire les babiroussas dans les années 90. Puis il y a eu un manque ou une perte d’expérience, ce qui fait qu’on a manqué de reproduction et au fil du temps, on est arrivé sur des toutes petites populations. »
Au sein des parcs zoologiques, la reproduction de l’espèce est gérée au niveau européen par un EEP (Programme Européen pour les Espèces menacées) mais aussi au niveau international par un GSMP (Global Species Management Plan), permettant d’optimiser son élevage en captivité. En dehors du CERZA, seuls 12 établissements zoologiques présentent et élèvent des babiroussas en Europe. Il y a quelques années, l’espèce a bien failli disparaître des zoos européens, la population se faisant vieillissante. Mais le Zoo de Chester au Royaume-Uni a décidé d’en relancer l’élevage en faisant venir des individus des USA où la situation était différente. « Toute notre population en Europe vient des États-Unis, nos babiroussas sont arrivés du Zoo de Chester. Il n’y a pas un nombre énorme de fondateurs ce qui fait que les individus restaient liés génétiquement les uns aux autres. » Le venue de nouveaux individus au sein du programme européen de reproduction a permis d’y apporter du sang neuf pour relancer la reproduction de l’espèce. « L’objectif d’un programme d’élevage c’est d’avoir une population démographiquement et génétiquement viable. Si on évite d’avoir des bébés pour la consanguinité, on va avoir une population vieillissante qui au final, ne fera plus de bébés, ce qui fera disparaître l’espèce des parcs zoologiques. Donc l’objectif c’est d’avoir une pyramide des âges avec une bonne base, avec des individus jeunes qui sont aptes à se reproduire, pour ensuite apporter de nouveaux gènes. »
Un cochon atypique et menacé
Le babiroussa est un membre atypique de la famille des suidés, celle-là même qui abrite les sangliers, les phacochères ou encore les cochons domestiques. Celui-ci a la particularité d’avoir une peau pratiquement dépourvue de poils et possède, chez le mâle, des dents très développées. « Ce sont les canines de la mâchoire supérieure qui traversent le palais pour revenir sur le front de l’animal, poursuit Frédéric Houssaye. Et celles de la mâchoire inférieure passent sur les côtés. Elles poussent vers le haut et continuellement. » Chez le babiroussa, le mâle a tendance à être un peu plus solitaire alors que les femelles vivent en groupe d’une dizaine d’individus avec leurs petits. L’espérance de vie de cette espèce est comprise entre 8 et 12 ans dans la nature mais peut dépasser les 20 ans en parc zoologique.
Malheureusement, le babiroussa est aujourd’hui classé « Vulnérable » (VU) sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Dans la nature, il ne vit qu’en Indonésie, sur différentes îles, où l’on estime sa population à environ 4 000 individus. Il subit principalement la chasse illégale ainsi que la perte grandissante de son habitat naturel à cause de la déforestation, de l’exploitation minière et forestière et de la plantation de palmiers à huile. Le CERZA contribue à la conservation du babiroussa dans son milieu naturel en soutenant financièrement une association consacrée à sa protection ainsi qu’à celle d’autres espèces. « Nous soutenons une association qui s’appelle Action Indonesia, c’est un regroupement de parcs zoologiques à travers le monde qui a pour but de gérer la population captive mondiale et de financer des projets dans la nature. Cela concerne quatre espèces : le babiroussa, le banteng, l’anoa et depuis deux ans, le tigre de Sumatra. Au CERZA, nous finançons les actions de cette association depuis deux ans. » Cette association travaille à la diminution du braconnage, l’accroissement des populations de ces quatre espèces en Indonésie et sensibilise les communautés locales à leur protection.