© Nature et Zoo
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La naissance d’oursons à lunettes au CERZA

En début d’année, la famille des ours à lunettes du CERZA s’est agrandie avec la venue au monde de petits jumeaux, un mâle et une femelle.

L’année 2023 du CERZA a été marquée par de nombreuses naissances chez des espèces menacées et sur lesquelles il y a de forts enjeux de conservation. Les ours à lunettes, les ours bruns ainsi que les géladas ont déménagé dans de nouveaux espaces au cours des derniers mois dans l’optique générale d’améliorer leurs conditions de vie et de leur proposer toujours plus d’enrichissements. Des nouveaux enclos, une nouvelle espèce, une nouvelle passerelle et des naissances marquantes : retour sur l’année 2023 du CERZA.

Une naissance de jumeaux chez les ours à lunettes

Le 11 janvier 2023, une portée de deux petits oursons à lunettes a vu le jour au CERZA. Cette naissance est une excellente nouvelle pour cette espèce représentée par moins de 10 000 individus dans la nature. « Les petits naissent à peu près entre mi-décembre et fin janvier en Europe, explique Frédéric Houssaye, Responsable de la conservation au CERZA. Les oursons à lunettes ne grandissent pas très vite, ils sont encore assez petits. Ils atteignent généralement la maturité sexuelle autour de 4 ans mais auront leur taille adulte vers l’âge de 2 ans. » Tierra, la femelle reproductrice du parc, a donné naissance à sa seconde portée composée d’un petit mâle, Tiwanaku, et d’une petite femelle, Ch’aska. À l’âge adulte, Ch’aska devrait atteindre un poids d’environ 80 kg contre plus de 150 kg pour son frère Tiwanaku. « Il y a une belle différence morphologique entre le mâle et la femelle chez tous les ursidés. » Nocturnes et crépusculaires, les ours à lunettes sont presque exclusivement végétariens. « L’ours à lunettes est omnivore, donc il mange des fruits et des légumes, un petit peu de viande, mais surtout des végétaux. Dans la nature il va manger énormément de plantes épiphytes, ces plantes qui poussent sur les arbres, où les racines sont à l’air libre, comme certaines orchidées, des broméliacées, ils adorent ça. »

Cette année, la famille des ours à lunettes du CERZA a déménagé dans un tout nouvel espace comprenant également un nouveau bâtiment et un enclos de maternité. Âgés aujourd’hui de bientôt 11 mois, les deux jeunes ours ont passé les premières semaines de leur vie aux côtés de leur mère à l’intérieur du bâtiment. Ils ont ensuite découvert leur espace extérieur il y a quelques mois et sont visibles dans cet espace spécialement conçu pour la mère et ses petits, à l’écart des autres membres du groupe. Ils n’hésitent d’ailleurs pas à grimper de plus en plus haut dans les arbres malgré leur jeune âge. « Ils sont très actifs et très agiles. À 11 mois, ils grimpent déjà en haut sans problème. Pour le moment, ils s’amusent surtout à tirer sur les branches. » Avec cette agilité à toute épreuve, ils pourront prochainement se reposer à la cime des arbres. « Les ours à lunettes ont tendance à faire des nids dans les arbres, ils cassent les branches pour se créer un petit nid en les mettant les unes sur les autres et se reposer dans la journée. Quand on voit des branches tomber, c’est surement qu’un ours est en train de se créer un nid. »

Un échange avec le Zoo de Maubeuge pour la reproduction

Menacé dans la nature, l’ours à lunettes, ou ours des Andes, bénéficie d’un Programme d’Élevage Européen pour les Espèces menacées (EEP) mené par le Zoo de Berlin en Allemagne. L’espèce n’est observable que dans 5 parcs zoologiques à travers la France où seuls trois oursons ont vu le jour en 2023. Avant la naissance de ses derniers oursons, le CERZA abritait trois femelles : Tacha, la mamie du groupe âgée de 28 ans, Tierra, une femelle née en 2013 et sa fille, Boog née au parc en 2017. « Boog c’est la grande sœur des petits oursons, elle est dans l’enclos principal avec Tacha. » En l’absence de mâle dans le groupe et suite aux recommandations du coordinateur européen des ours à lunettes, le CERZA et le Zoo de Maubeuge ont temporairement échangé deux individus l’an dernier dans le but de favoriser la reproduction de l’espèce. Le Zoo de Maubeuge, qui abrite actuellement deux mâles, Uco et Amador, âgés respectivement de 22 et 18 ans, a envoyé l’un de ses ours vers le CERZA pour accueillir une femelle et essayer de former deux couples reproducteurs. « Notre femelle Boog est partie au Zoo de Maubeuge pour tenter une reproduction avec Amador tandis que nous, nous avons accueilli Uco pour former un couple avec Tierra. » Uco connaît d’ailleurs très bien le CERZA puisqu’il y est né en 2002, c’est le fils de Tacha, la femelle la plus âgée. Il a rejoint le Zoo de Maubeuge en 2009 et n’est génétiquement pas lié à Tierra. Quant à Amador, il est né au Bioparc de Doué-la-Fontaine en 2006 et a rejoint Maubeuge en même temps que son comparse. « Les chaleurs des femelles ont lieu jusqu’à mi-juillet, entre mai, juin et jusqu’à la mi-juillet, ajoute Frédéric Houssaye. Nous avons fait notre transfert très tardivement, début juin 2022, mais cela a quand même fonctionné pour l’une des deux femelles. »

Après quelques mois loin de chez eux, les deux ours ont ensuite fait le chemin inverse pour retrouver leur lieu de vie, Uco à Maubeuge et Boog au CERZA. Sur les deux femelles, seule Tierra aura été gestante et a donné naissance à ses deux nouveaux petits. Aujourd’hui, les oursons ont d’ailleurs rencontré Boog, leur grande sœur, ainsi que Tacha et les chiens des buissons récemment installés dans l’enclos principal. « Il nous a fallu du temps pour observer, l’idée ce n’est pas seulement de les mettre dans l’enclos avec les autres, c’est aussi de suivre et voir si tout se passe bien, donc il faut quelqu’un constamment. Nous avons rentré les chiens des buissons quelques jours pour laisser les ours à lunettes découvrir tout l’enclos tranquillement, parce qu’il y a quand même pas mal de surface, il faut les laisser observer et découvrir tout, qu’ils puissent avoir des petits points de fuite, savoir où est-ce qu’il faut grimper etc… »

Le seul ursidé présent en Amérique du Sud

L’ours à lunettes est originaire du continent sud-américain, du Venezuela jusqu’en Bolivie, où il occupe les régions montagneuses des Andes, dans les forêts humides d’altitude. L’espèce est aujourd’hui considérée comme « Vulnérable » (VU) sur la liste rouge de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) et se trouve notamment menacée par le braconnage en représailles des dégâts qu’elle peut causer sur les cultures mais aussi par la dégradation et la disparition de son habitat naturel. « Depuis l’année dernière, le CERZA soutient un projet de conservation des ours à lunettes, dans la Réserve de Chaparri au Pérou, détaille Frédéric Houssaye. C’est un projet qui est emmené par le Bioparc de Doué-la-Fontaine et auquel nous donnons chaque année 16 000 €. » La Réserve Écologique de Chaparri est la plus grande aire de conservation de forêt sèche du nord du Pérou dans laquelle sont implantées les associations Tu Tierra et ACOTURCH que soutient le CERZA. Elle abrite également un centre de secours pour les ours à lunettes issus de saisies par les autorités ou venant de particuliers, leur offrant des lieux de vie bien plus adaptés et offrant, quand cela est possible, des opportunités de réintroductions pour certains d’entre eux.

Pour endiguer la destruction de la forêt sèche où vivent les ours à lunettes, l’association Tu Tierra propose une alternative productive et durable aux communautés locales pour la conservation des forêts. « Le but c’est de pouvoir créer des corridors de forêts entre les zones protégées. Mais pour pouvoir mener à bien ce travail, l’idée c’est de travailler avec les acteurs locaux, les éleveurs, pour leur donner des ruchers d’abeilles mélipones. » L’abeille mélipone est une abeille originaire d’Amérique centrale et du sud qui a la particularité de ne pas piquer et de produire un miel beaucoup plus intéressant économiquement pour la population. L’association prend alors en charge la fourniture et la formation à l’élevage de ces abeilles sauvages pour les populations locales. « L’objectif pour les péruviens c’est de pouvoir produire ce miel qu’ils vendront plus cher, et pour s’assurer d’avoir une bonne production de miel, il faut que les abeilles soient en bonne santé et qu’elles aient surtout à manger, donc il faut préserver les forêts. C’est en commençant ce travail là qu’ils pourront mettre en place ce corridor de forêt. » La présence des ruchers d’abeilles mélipones favorise la protection de la forêt et sa régénération au profit des ours à lunettes mais pas seulement. « Nous participons à la protection de l’ours à lunettes qui est « l’ambassadeur », l’espèce parapluie, mais bien sûr à côté il y a les condors, les pénélopes, de très grands oiseaux aussi très rares, énormément de reptiles, il y a toutes ces espèces là qui sont elles aussi protégées grâce à l’ours à lunettes. »

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